Miscellaneous
Arts, science, technology and history
Un fonds hétéroclite
Ce fonds modeste et varié, est constitué d’objets manufacturés anciens ne relevant pas directement ou exclusivement des collections de sciences du muséum. Ensemble de natures diverses : bustes, maquettes préparatoires, instruments scientifiques, matériel pédagogique ou plans en relief, il se rapporte aussi bien à l’histoire des sciences, de la muséographie ou des expositions qu’aux beaux-arts et arts et traditions dits populaires.
Cette hétérogénéité qui les rend difficilement classables au sein du muséum est due à leurs origines. Ils n'ont pas toujours été acquis spécifiquement pour l’enrichissement des fonds (c'est le cas des collections pédagogiques devenues aujourd'hui patrimoniales), sont généralement des items isolés ne s'inscrivant pas nécessairement dans un lot cohérent au moment de leur entrée (notamment pour les bustes de donateurs cédé avec les collections) et sans le contexte d'acquisition leur place au musée pourrait poser question.
arts et SCIENCEs
Émile Cartailhac par Victor Ségoffin fondu par Andro 1922 - coll. muséum, MHNT.MISC.2001.0.2
Avant l’apparition de la photographie et la démocratisation de ce procédé, pratiques scientifiques et artistiques sont complémentaires, le recours aux arts picturaux est indispensable aux naturalistes qui souhaitent publier leurs découvertes. Quand les chercheurs ne réalisent pas eux-mêmes ces représentations, ils font appel à des dessinateurs naturalistes ou des mouleurs qui participent parfois aux expéditions et missions d'exploration.
C'est le cas de Pierre Marie Alexandre Dumoutier, phrénologiste et mouleur, qui participe à la l’expédition de Jules Dumont d’Urville dans les mers du Sud (1837-1840). À leur retour, le laboratoire d'anthropologie du Muséum national reproduit et diffuse largement ces bustes, on en retrouve aujourd'hui dans plusieurs écoles d'arts et musées dont celui de Toulouse .
Philippe Picot de Lapeyrouse fait appel à Pierre-Joseph Rédouté et à l’ingénieur et botaniste Laferrerie pour les dessins des planches1 de Figures de la flore des Pyrénées, 1795-1801 (coll. muséum, cote A 58, Rosalis). Certaines des planches de Laferrerie sont présentées aux Expositions des produits des beaux-arts et de l’industrie de Toulouse de 1827 et 18292 parmi des montages ostéologiques, animaux naturalisés, boîtes entomologiques et moulages anatomiques3.
En 1844, les peintres toulousains Léon Soulié4 et Jules Boilly5 travaillent sur la naturalisation de la girafe morte à Toulouse avec Nicolas Joly, Achille Lavocat et le taxidermiste Fleury Traverse. Une étude illustrée sur la préparation de cette girafe (toujours conservée au muséum et restaurée en 1910 par Philippe Lacomme) est publiée6.
P. M. A. Dumoutier
(1797 - 1871)
À cette époque, les artistes bénéficient d'une grande estime de la communauté scientifique, les préparateurs, mouleurs et taxidermistes sont considérés et désignés comme tels. De tous temps, artistes et architectes s'inspirent du monde naturel. Avec la colonisation, les Occidentaux découvrent des cultures et espèces animales et végétales qui leur étaient jusqu'alors inconnues et dans lesquelles ils puisent. C'est le cas de Théodore Rivière dont le muséum conserve une statuette d'homme éthiopien ainsi que des médaillons de personnes liées au musée.
Les préparateurs dispensent des formations, étudiants et amateurs s’exercent au dessin dans les galeries du muséum et des collections sont prêtées à l’École des beaux-arts pour les travaux d’après nature7. Cette pratique perdure pendant plus d'un siècle et une collection spécifique est constituée à cet effet8.
Par ailleurs, des artistes enrichissent les collections toutes disciplines confondues : le peintre Fernand Mazzoli9 fait don d'une massue de Nouvelle-Zélande en 1873, l’affichiste Arthur Foäche d'un putois naturalisé en 1902 et en 1965 le musée acquiert la collection d’oiseaux en peau de Roger Reboussin, artiste animalier, ornithologue et professeur de dessin au Muséum national.
Éléphant d'Asie en fureur, maquette préparatoire pour la naturalisation de l'éléphant Punch, P. Lacomme, 1911 - coll. muséum, MHNT.MISC.2018.0.1
Journal du laboratoire de Philippe Lacomme mentionnant un prêt au professeur Henry Parayre (voir ses œuvres dans le catalogue des Augustins)
Théodore Rivière
(1857 - 1912)
Préparations et moulages anatomiques
Une partie de ce fonds découle des pratiques des préparateurs du laboratoire.
Parmi les moulages, une série de pièces anatomiques réalisées par sur les dépouilles des animaux et destinées à conserver une trace des volumes et de l'implantation de la musculature pour la préparation des spécimens.
Également, une importante série de dentures fossiles et actuelles en plâtre qui servait à l'étude comparative des espèces (collection Édouard Lartet) inventoriée dans le fonds des miscellanées pour conserver la cohérence du lot mais qui relève des disciplines de paléontologie, préhistoire et zoologie.
Le moulage, par la production de multiples était propice à l'étude et surtout à la diffusion. En outre, dans les fonds de sciences naturelles, quand le spécimen type original qui a servi à décrire l’espèce a disparu, sa copie prend une autre dimension scientifique et patrimoniale et devient un plastotype. Certaines des maquettes préparatoires en cire de Philippe Lacomme, préfiguration de ses futures naturalisations, ont été coulées en plâtre ou en bronze et ainsi pérennisées elles passent du statut d’études anatomiques à celui d’œuvres.
Structure et maquette de l'éléphant par le préparateur P. Lacomme, photo. : A. Pujol - coll. muséum, MHNT.PHa.912.M2.02
BUSTES et médaillons
Le fonds des bustes se compose de bustes dits "anthropologiques" ainsi que de bustes des personnalités liées à l'histoire du musée et des collections.
Parmi les bustes "anthropologiques", les moulages sur nature du phrénologiste Pierre-Marie Alexandre Dumoutier (Expédition de Jules Dumont d’Urville 1837-184010). L'objectif était de rapporter des reproductions des populations rencontrées destinées à l'étude comparative. Des copies de ces moulages ont été largement envoyées en France et à l’international dans les musées et écoles à vocation scientifique et artistique. Ils servaient à l’étude anatomique et avaient une dimension esthétique et "exotique" qui attirait les publics, curieux de découvrir des populations lointaines nouvellement découvertes par les occidentaux. La phrénologie avait pour but de classer les individus et les populations. Pseudo-science obsolète, éthiquement discutable et déjà critiquée de son temps, on peut se demander dans quelle discipline cataloguer ces objets. Initialement inventoriés en anthropologie pour correspondre à leur catégorisation au moment de leur entrée au XIXe sans aucune justification scientifique, ils font désormais partie du fonds des miscellanées.
Ce fonds comprend également des surmoulages de bustes réalisés par le médecin Léon Palès au Tchad dans années 30 et copiés par le préparateur Philippe Lacomme qui en a également réalisé une série envoyée à Marseille.
Les réalisations artistiques, portraits en statue ou bas-reliefs exécutés par des artistes reconnus, étant un moyen d’immortaliser les érudits et de les présenter au public, certains dons anciens comprennent des bustes signés par Théodore Rivière, Victor Ségoffin ou Charles Rouède. Conservateurs, préparateurs et scientifiques sont représentés dans cette petite série et quoique relevant des beaux-arts, ces œuvres sont liées au musée de par les sujets représentés et leurs dimensions historique et affective.
Collections pédagogiques
Les soixante-quatre moulages de champignons de Jean-Eugène Trablit, répartis en deux séries "comestibles" et "non comestibles", sont acquis en 1912 dans un but pédagogique et éducatif à l'image des boîtes scolaires du fonds d'ethnobotanique quoique ce dernier comprenne une portée propagandiste et commerciale.
Dans la veine pédagogique, on trouve également des modèles anatomiques de la Maison Deyrolle et les demi-écorchés de Jules Talrich.
Également, deux mannequins illustrant la chasse au faucon et le gavage de l'oie réalisés par Philippe Lacomme pour les espaces d'exposition ont été conservés, illustration de la muséographie des années 30. La gaveuse d'oie a été présentée à la gare d'Orsay à l'occasion d'une campagne de promotion touristique organisée par la Compagnie des chemins de fer.
Paléoart
Le musée conserve quelques pièces de paléoart, catégorie définie comme regroupant les reconstitutions préhistoriques ou paléontologiques basées sur des connaissances scientifiques « justes » au moment de leur création.
Ainsi, un homme et une femme préhistoriques d'Yvonne Parvillée et les représentations de mégacéros de Marthe Alers-Abran (élève de Rodin) et trois dinosaures de Vernon Edwards.
Reconstitution des bisons du Tuc d'Audoubert par Lacomme, tirage en bronze - coll. muséum, MHNT.MISC.2019.0.1
Buste d'Édouard Filhol par Charles Rouède circa 1835, legs Marie Bertrand 1953, photo. : J. Catalo - coll. muséum, MHNT.MISC.2022.0.1.4
Maquette Les animaux disparus. Le mammouth, P. Lacomme filmée par Joseph Mandement en 1918 - coll. muséum, MHNT.MISC.2014.0.6
Femme préhistorique Yvonne Parvillée et Maurice Faure, circa 1925 - coll. muséum, Yvonne-Parvillee-MHNT.MISC.2025.0.14
Homme préhistorique Yvonne Parvillée et Maurice Faure, circa 1925 - coll. muséum, Yvonne-Parvillee-MHNT.MISC.2025.0.15
Cerf mégacéros de M. Alers, déménagement des collections, photo. : Pierre Dalous
Plans
Autres exemples de procédés artistiques à des fins scientifiques, les plans-reliefs modelés et sculptés par des cartographes comme le pyrénéiste Toussaint Lézat et les reconstitution de dolmens étudiés par Émile Carthailhac. Ce dernier a longtemps œuvré pour la création d'une galerie de géographie au muséum, bien qu'ayant fini par aboutir, cette salle a été éphémère.
matériel scientifique
Très à la marge en volume, les anciens outils de travail ou éléments de décor, parfois aujourd’hui considérés comme désuets, ne sont pas pour autant dénués de valeur, témoins de l’histoire de l’établissement et des pratiques, ils font partie des collections.
C'est le cas du marteau du préparateur Victor Bonhenry, d'un vasculum (boîte en fer pour la collecte botanique) rentrée récemment dans les fonds ou des matrices d'imprimerie des illustrations de la revue Matériaux pour l'histoire primitive et naturelle de l'homme dirigée par Cartailhac et Eugène Trutat.
Lorsque de façon évidente un objet ne s’inscrit pas dans une pratique ou une histoire qui justifie sa conservation au muséum, en fonction de sa nature, il peut être transféré dans un autre établissement de la municipalité et intégrer une collection existante. Cela a par exemple été le cas pour des sculptures qui ornaient les escaliers et le cloître du muséum avant sa rénovation.
Observés hors de leur contexte d’utilisation ou de présentation d’origine, ces artefacts, devenus objets de musée11, nous en apprennent autant sur la manière dont étaient abordés et diffusés les savoirs scientifiques que sur les techniques de travail ou la représentation sociale des praticiens et théoriciens locaux de cette époque.
Modèle réduit de Tyrannosaure par V. Edwards, photo. : Daniel Martin - coll. muséum, MHNT.MISC.2016.0.9
Notes et références
- “Picot de Lapeyrouse d’après des documents conservés à la bibliothèque du Muséum national”, Y. Laissus, Bulletin de la Société d’Histoire naturelle de Toulouse, 1972, T.108, Gallica, BNF
- “Les peintres toulousains et les Pyrénées à l’époque romantique”, Marguerite Gaston, Annales du Midi, 1972, Persée
- Exposition des Produits des Beaux-Arts et de l'Industrie à Toulouse : Dans les bâtiments municipaux de la rue Neuve Saint-Aubin : Année 1858, Rosalis
- Le fonds Léon Soulié au musée Paul Dupuy
- Ses tableaux dans le catalogue du musée des Augustins.
- Recherches historiques, zoologiques, anatomiques et paléontologiques sur la girafe, (Camelopardalis giraffa, Gmelin), Nicolas Joly et Achille Lavocat, 1845, coll. muséum, cote 493.930 JOL, Rosalis
- Procès verbaux de la commission techniques - archives muséum, A 06 12 43
- On trouve des demandes de prêts et d’autorisations pour dessiner dans les galeries notamment dans les journaux du laboratoire du préparateur.
- Mazzoli dans le catalogue du musée Paul Dupuy.
- Le compte rendu de l’expédition, Voyage au Pôle sud et dans l’Océanie sur les corvettes « L’Astrolabe » et « la Zélée », est consultable à la bibliothèque du muséum (cotes C 2152 à 64) et dix volumes sont en ligne sur BHL.
- Christian Ruby aborde ce statut de l’objet au regard de son observateur et de son inscription dans une collection, particulière ou muséale, dans Vies d’objets, souvenirs de guerre, Nancy, pun-Éditions universitaires de Lorraine, 2015, Questions de communication, vol. 30, 2016, cairn.info. Il évoque également le (dé)cloisement des arts, sciences et techniques dans son article « Arts et Sciences / Sciences et Arts. Sur une médiagraphie en cours de réalisation », Le Philosophoire, vol. 35, 2011, cairn.info
Photo. d'en-tête : Exposition de géographie, Jacobins, Toulouse, par Eugène Trutat - MHNT.PHa.1824.A.50
Julia Vila, chargée de recherches documentaires et des collections de miscellanées, 2019, mise à jour 2025
















